LA ZONA, de Rodrigo PLA (Mexique, 2008, 1h38) avec Daniel Gimenez CACHO, Maribel VERDU et Carlos BARDEM.
Dans une ville mexicaine, une gated community jouxte un bidonville. Un mur, des barbelés et des caméras de surveillance séparent ce monde clos et sécurisé de la réalité. Un soir de pluie, un poteau tombe sur le rempart et met à mal le système de surveillance. Trois jeunes s'y introduisent afin de voler quelques objets dans une maison. Ils n'en sortiront jamais...On connait le cinéma mexicain à travers des réalisateurs comme INARRITU (Amoures Chiennes, Babel), CUARON (Y tu mama tambien, Les fils de l'homme) ou encore DEL TORO (Le labyrinthe de Pan)...PLA semble s'inscrire dans cette lignée d'hommes au talent certain et à la personnalité affirmée. Comme INARRITU, son cinéma tire son essence dans la société mexicaine, dans ce qui en fait une succursalle des dérives américaines.
L'exemple des Gated Communities, ces ghettos pour riches, fermés sur eux même, en total autarcie, en est le meilleur exemple.
PLA confronte les extrèmes avec vigueur et parfois cruauté. A ce bastion doré il oppose un bidonville boueux, une ville sale et peu avenante, qui pue le danger. De l'autre coté du mur, tout est propre, tout est ordonné, pas un brin d'herbe ne dépasse.
Comme CUARON son cinéma est transgressif, virulent. La séparation n'est pas seulement géographique et physique; elle est politique et morale. Dans la Gated, on se croit au dessus de toutes les lois, on est des privilégiés. On s'octroie des droits à coup de chéquier et de pesos. On a peur de tout. Le constat est bien celui là: PLA fait la description féroce d'une société qui a peur d'elle même, de ce qu'elle rejette et de ce qu'elle produit. Qui a peur de la misère qu'elle crée et d'y tomber un jour.
Comme DEL TORO enfin, il mélange sa fable sociale d'une fable d'enfant. La rencontre entre les deux ados que tout sépare est sans doute un point de bascule dans le film. Ils sont de toute part, manipulés par un monde adulte qui leur ment, qui ne les écoute pas, qui se défoule sur eux.
A la faiblesse de son argumentaire, notamment des dialogues, notre réalisateur oppose une redoutable efficacité des images, une mise en scène âpre, à la violence parfois saisissante, voire insoutenable. On est secoué, souvent révolté, une boule se crée dans notre estomac et nous empêche de respirer. Un coup de poing, fort, là ou le bas blesse, avec l'intransigeance d'un cinéaste qui n'a pas peur de dévoiler son pessimiste face à sa société corrompue et malade.
note: 4/5. DELIVREZ NOUS DU MAL, de Amy BERG (Etats-Unis, 2008, 1h40). Documentaire.
Amy Berg revient sur une affaire de pédophilie qui a secoué l'Eglise. C'est celle du père O'Grady, prètre californien qui abusa de son statut de guide spirituel afin de profiter de jeunes enfants.Armez vous d'une certaine motivation pour voir un film pareil. Déjà vous ne le trouverez pas partout. Sorti dans deux salles, il n'est actuellement disponible qu'au MK2 Beaubourg.
Après...c'est une plongée dans l'horreur la plus complète. On reste abasourdi devant les révélations, devant ce véritable marasme juridique. On ne peut qu'être choqué, tout est fait pour de toute façon. Amy Berg, qui a réalisé des films et des téléfilms pour la télé US sur le même sujet, maîtrise très bien les codes qui font larmoyer la ménagère, qui font s'offusquer le bourgeois, bref elle maitrise parfaitement le sensationnel et en use, voire en abuse jusqu'à ce que son documentaire tourne parfois au déballage impudique et irrespectueux de familles traumatisées par ce pédophile en liberté.
Car oui, aussi impensable que cela puisse paraître, O'Grady est en liberté, dans son pays natal, l'Irlande. La réalisatrice l'a retrouvé, lui qui a pendant plus de 20ans abusé un nombre incalculable d'enfant en Californie, avec la complicité de ses supérieurs qui ont étouffé l'affaire et fermé les yeux sur ses agissements afin de préserver leur image, leur carrière...leur nom.
On est donc totalement estomaqué de voir O'grady se balader dans un parc pour enfant, parler ouvertement de sa pédophilie, comme si rien ne l'empéchait de recommencer.
Cette terrifiante charge contre l'Eglise, car elle est bien adressée contre l'institution elle même, qui a caché des preuves, fermé les yeux, brisé des vies, est a prendre avec des pincettes tout de même. Il est nécessaire de prendre du recul face à cet exemple, ce cas unique qui s'appuie sur des témoignages forts et calibrés au milimètre et qui s'interroge plus sur le célibat des prêtres que sur la pédophilie elle même, qui apparait comme une conséquence directe de ce voeu de chasteté observé par les hommes d'Eglise.
note: 3/5.