Semaine 2: Actrices et Tarnation

ACTRICES, de Valeria BRUNI-TODESCHI (2007, France, 1h47), avec Valeria BRUNI-TODESCHI, Mathieu AMALRIC, Louis GARREL et Noémie LVOVSKY.

Marcelline est une actrice un peu paumé, habité d'une grande candeur et de grandes interrogations. Qui suis-je? pourquoi suis-je ici? et pourquoi à 40ans suis-je toujours seule et sans enfant. Alors qu'elle est engagée dans une troupe de théâtre pour interpréter le rôle de la grande Natalia Petrovna (Tourguéniev, Un Mois à la campagne), ses interrogations vont très vite se cristalliser et influer sur ses rapports avec tous ceux qui l'entourent.

Si le propos est débridé, le récit lui parrait un peu mince et assez bancal. Bruni-Todeschi fait preuve, en tant que réalisatrice d'un certain sens du cadre, d'un certain sens du pourquoi qui n'est pas toujours bien compréhensible. Elle est, en tant qu'actrice, totalement habité par cette névrosée candide, égocentrique et instable, qui alors qu'elle a 40 ans s'interroge enfin sur sa situation, remet enfin en question son Moi un peu disproportionné, avec une maladresse incroyable, une gaucherie inénarrable.
Pourtant, c'est bien cette dimension comique qui manque à Actrices. Les situations comiques sont bien rares, les bons mots ou les quiproquos trop éparses et menus pour vraiment tenir le récit d'un bout à l'autre.
Actrices finit par n'être d'une déambulation tantot histérique, tantot maladive, tantot joyeuse dans l'esprit d'une femme, peut être parfois des femmes qui cherchent un sens à leur vie, des actrices, dont le métier n'est peut être pas si simple qu'on ne le croit, mais n'arrive jamais à concilier ses trois aspects pour faire un grand film humain et drôle.
note: 2/5.

TARNATION de Jonathan CAOUETTE (2004, Etats-Unis, 1h28) avec Jonathan CAOUETTE, Renée LEBLANC et David SANIN PAZ.

Autobiographie à base d'images d'archives familiales, de reconstitutions et de témoignages de l'acteur Jonathan Caouette, acteur homosexuel de 31ans.

C'est le premier film qui ne soit pas de l'année écoulée ou qui ne soit pas "récent" que je propose. Ce n'est pas mon préféré et pourtant c'est l'un des plus interessants qu'il m'ait été donné de voir. Le premier mot du résumé est un soit intriguant. "Autobiographie"...combien d'autobiographie cinématographique avez-vous eu l'occasion de voir dans votre jeune existance?
Personnellement je ne peux me vanter d'en avoir vu qu'une seule, Et les laches s'agenouillent, de Guy MADDIN (2004), récit incongru, fantasmé et donc romancé de morceaux de la vie du réalisateur.
Ici il n'y a pas de romance, il n'y a pas de choses à cacher, au contraire, on pourrait même repprocher à Caouette d'être dans le débalage, mais son travail transcende cette critique. En somme, ce film est une petite révolution; il révolutionne le récit biographique au cinéma car il y porte l'interrogation du Moi, du Soi et de la perception d'un microcosme tout à fait singulier. Il révolutionne aussi la façon de faire de la biographie par un travail qui relève du documentaire. Caouette mélange des films de famille, des morceaux de sa vie qu'il filme depuis qu'il a 11ans en super-8, des moments d'intimité avec sa mère, malade, son compagnon, des moments de solitude, de grande dépression. Il ne nous cache pas grand chose mais rien n'est forcé, tout est naturel, pure, et relève d'un besoin d'évacuer une vie loin d'être rose.
Son entreprise est doublée d'un travail de mise en image intrigant. Caouette monte son film comme un récit de douleurs mais aussi de rencontres, d'influence diverse, de tout ce qui a permis de faire de lui ce qu'il est à 31ans. Ca va du graphisme pop des années 80 aux rencontres avec ses premiers mecs, ses premiers rapports sexuels, l'univers underground...Tout cela se retrouve visuellement et apporte une forte singularité à un film qui n'en manquait déjà pas. On a même parfois l'impression d'être dans un film d'Andy Warhol, envouté par un certain psychédélisme.
Finalement il réussit un film à la fois intimiste et décalé, qui parvient à interroger le spectateur sur son interprétation de sa propre histoire, sur sa vision de ce qu'il est. Le film est dur, le film est émouvant, il est pur et captivant, maladroit et sincère.
Pour la petite anecdote, le film coûta 218,32$ et fut remarqué par Gus VAN SANT au festival de Sundance 2003, qui décida de le produire et de le distribuer.
note: 3/5.